Titre
original:
Akai
tenshi |
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Réalisateur: MASUMURA Yasuzo |
Année: 1966 |
Studio: Daiei
Genre: Guerre |
Avec:
WAKAO Ayako ASHIDA Shinsuke KAWAZU
Yusuke AKAGI Ranko |
dre |
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La Samaritaine
Adapté du roman de
Yorichika ARIMA, ''L'ange rouge'' est un violent pamphlet sans concessions
contre les horreurs de la guerre et ses cicatrices infligées aux hommes.
Profondément déprimant et pessimiste, MASUMURA réalise un
chef-d'uvre inoubliable.
Durant la guerre sino-japonaise,
l'infirmière Nishi Sakura est envoyée dans un hôpital
militaire en Mandchourie. Assistant aux horreurs de la guerre, elle a
principalement à intervenir de nombreuses heures durant sur l'amputation
de soldats gravement touchés au front en déperdition. Tout
d'abord violée par une chambrée d'invalides, elle accepte par la
suite la proposition de coucher avec un homme ayant amputés des bras ;
mais au fond d'elle-même, elle tombe amoureuse du chirurgien en charge,
un morphinomane rendu impuissant par la drogue. Mobilisée dans un autre
hôpital plus proche du front, elle doit lutter contre une
épidémie de choléra, alors que l'édifice est sujet
à l'assaut final par les chinois.
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Ancien critique de cinéma,
Yasuzo MASUMURA est pris sous contrat par les studios de la Daiei dès la
fin des années '40s. Assistant de MIZOGUCHI ou ICHIKAWA, il
réalise son premier métrage en 1957. Fort d'une soixantaine de
films, sa filmographie comporte autant de commandes populaires, que
d'uvres plus intimistes. Personnellement impliqué dans la guerre,
son expérience lui a servi pour signer plusieurs films de guerre.
Traumatisé par ce qu'il avait pu y vivre, il s'attache - tels que les
réalisateurs KOBAYASHI ou ISHIKAWA - à aborder de front de
nombreux épisodes autrement tus et rarement abordés. L'ange
rouge est donc le portrait d'une femme confrontée indirectement aux
horreurs de la Seconde Guerre Mondiale. Infirmière, elle est l'une des
rares à être mobilisée au front pour prêter main
forte aux opérations entreprises dans de conditions précaires sur
des soldats mutilés au combat. Si le fait de montrer une femme
mêlée au conflit est assez rare pour être signalé, il
n'en va pas autrement du portrait des soldats blessés ; rarement le
problème des invalides a été abordé dans de films,
sauf en de rares cas récents concernant des conflits d'autres
époques (Première Guerre Mondiale, Guerre du Vietnam
).
MASUMURA n'y va pas de main morte. Optant pour l'utilisation d'un Noir &
Blanc, il désamorce certes la couleur rouge sang, mais réussit
à créer une certaine ambiance clinique rappelant la
stérilité des blocs opératoires. Evoquant
l'atmosphère éthérée d'un ''Elephant Man''
réalisée quelques vingt-cinq ans plus tard, la galerie des
gueules cassées s'apparente également à l'homme de foire
du film de Lynch. Particulièrement réaliste et sans concession
aucune, les mutilations abondent et les interventions chirurgicales
charcutières remplissent nombre de seaux des divers membres
amputés.
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Au milieu de toute cette horreur,
le personnage de l'infirmière Nishi ressort effectivement tel un ange
d'innocence, du moins comme une samaritaine. D'une innocence et
naïveté touchante, ses malheurs au milieu des hommes
reflètent pourtant la cruauté d'une guerre. Objet de désir
pour les soldats loin de leurs femmes ou se sachant condamnés à
mourir, elle est rabaissée par des supérieurs l'intimidant
à ne faire preuve d'aucun sentimentalisme ; pourtant elle ne pourra
s'empêcher de tenter de répandre le bien autour d'elle : en
passant son viol sous silence, elle n'éprouvera que pitié lors de
sa nouvelle rencontre d'avec son bourreau ; elle ne saura refuser la demande
d'un de ses patients de lui faire l'amour et elle se bat pour l'amour et le
décrochage d'un chirurgien dépendant de la morphine. Jamais elle
craquera sous les fortes pressions s'exerçant sur elle et tentera de
faire bonne mine à un bien triste sort. Pourtant, son image
angélique est entachée par la mort qu'elle répand autour
d'elle : son violeur meurt au front, son amant se suicide et même son
chirurgien connaîtra un triste sort - la finale est d'ailleurs totalement
nihiliste, seule survivante au milieu de ses comparses. Masumura donne donc une
vision profondément pessimiste et noire de la guerre, où seule la
mort sort vainqueur d'un conflit futile. Engagés dans un combat qui les
dépasse, aucun soldat ne fait preuve de nationalisme ou d'une quelconque
fierté à se battre pour leur pays ; au contraire, ils souhaitent
tous rentrer le plus rapidement possible, certains allant même
jusqu'à laisser s'infecter des plaies expressément - au risque de
courir une amputation - pour avoir une chance d'être
démobilisé et de pouvoir rentrer au pays.
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La mort est donc
omniprésente tout au long du film et ne laisse aucune lueur d'espoir
quant à un quelconque gain dans le conflit. Même le chirurgien
abandonné toute motivation, travaillant d'arrache-pied des jours durant
sans s'arrêter pour tenter de secourir quelque malade, qui risque - au
mieux - de mourir sans trop de souffrances, ou - au pire - d'être
invalide jusqu'à la fin de ses jours. Au lieu de se battre, il
s'abandonne dans l'irréalisme procuré par les effets de la
morphine et en perd jusqu'à sa virilité masculine, en devenant
impuissant. Après une première partie sans concessions et
véritablement terrifiante, la seconde moitié du film s'attache
d'avantage à dépeindre l'impossible histoire d'amour entre
l'infirmière et son chirurgien en chef et de se focaliser sur le conflit
en lui-même. Retranché dans un petit hôpital proche du
front, à se battre contre une choléra dévastatrice en
intérieur et contre l'assaillant chinois venu de l'extérieur, le
film perd quelque peu de sa féerie noire, mais gagne en force
évocatrice de la Seconde Guerre Mondiale. Manquant du réalisme de
la trilogie guerrière La Condition de l'Homme de KOBAYASHI et de
l'onirisme de La Harpe de Birmanie d'ISHIKAWA, Masumura n'en crée
pas moins une uvre coup de poing, qui ne sait laisser son spectateur
indifférent. Enorme bras d'honneur aux films populaires plus
conciliants, la violence se dégageant des images appuie un propos
engagé typique des films de la Nouvelle Vague. |