Titre
original:
Minbo no
onna |
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Réalisateur: ITAMI
Juzo |
Année:
1992 |
Studio: Toho
Genre: Comédie |
Avec:
MIYAMOTO Nobuko DAICHI Yasuo UEDA
Koichi ITO SHiroi |
dre |
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Tricky Master
Comédie corrosive à
l'encontre des yakuzas, Juzo Itami continue son exploration sur les petits
travers de la société japonaise - au risque de sa propre
vie
Suite à l'invasion abusive
de yakuzas dans le lobby de l'hôtel de luxe ''Europa'', nuisant fortement
à l'image de marque, le gérant Kobayashi crée une division
spéciale pour s'occuper du problème. Composée d'un
comptable et d'un bagagiste, le duo n'a pas la moindre chance contre les
chantages toujours plus audacieux de la part des mafieux. Kobayashi fait alors
appel à une avocate, spécialiste des cas ''d'extorsions de
fonds''. L'affrontement entre la fine équipe de l'Europa et les yakuzas
sera des plus rusés
''Minbo'' est l'abréviation
japonaise pour ''minji kainyu boryoku'' signifiant l'action d'extorquer de
l'argent par la simple menace et sans enfreindre la loi. Basée sur la
simple intimidation ou allant même jusqu'à l'habile manipulation
de la pauvre victime, les yakuzas peuvent ainsi récolter de jolies
sommes d'argent sans se faire arrêter - faute de preuves
nécessaires. Phénomène bien réel - et plus
particulièrement dans les années '80s - Itami s'empare du sujet
sur le ton de la comédie corrosive. Son approche réaliste se voit
d'ailleurs confirmée par son agression par couteau par des membres d'un
clan après la sortie de son film. Défiguré, il survit de
justesse à cette attaque, mais sera dès lors constamment mis sous
pression par des yakuzas sans doute pas très étrangers à
son mystérieux suicide quelques années plus tard. Le portrait de
la communauté mafieuse est peu flatteuse et détonne dans un
paysage cinématographique autrement plus glorieux à son
égard : les yakuzas y sont dépeints comme des hommes
extrêmement mal habillés, ne pouvant s'exprimer qu'en hurlant et
cherchant à se faire un peu d'argent avec les combines les plus
éculées (le cafard dans le plat cuisiné) ; mais le
principal affront que leur fait Itami serait encore de les opposer à un
avocat féminin, un comble dans un monde - et une société -
principalement réservé aux hommes. Interprétée par
la truculente Nobuko Miyamoto, épouse d'Itami à la ville, elle en
démontre autant à ses employeurs de l'hôtel ''Europa'',
qu'à ses principaux adversaires en usant uniquement de sa langue (bien
pendue) et de sa ruse infiniment supérieure à celle de ses
homologues masculins. La scène de la balançoire est finalement en
tous points prémonitoire du réel et triste sort
réservé à son réalisateur, finalement le double
vivant du personnage de l'avocate.
Si l'humour est
omniprésent, il est distillé par petites touches et sans grandes
scènes d'hilarité. La lâcheté du duo ''anti-yakuza''
pas très futé, les vêtements grotesques des mafieux et
leurs pitoyables efforts d'extorquer la moindre somme par leurs combines de
plus en plus corsées, toutes ces scènes prêtent d'avantage
à sourire tout au long que de rire aux éclats ; en revanche - et
comme souvent chez Itami - plane derrière cette apparente bonne humeur
une ombre pesante. Traitant ce problème sur le ton de l'humour, Itami
n'en fait pas moins une véritable dénonciation féroce et
violente contre un réel problème de société. Le
film surprend ainsi par sa véritable audace et le sous-ton très
sérieux face aux pratiques mafieuses. Malheureusement, Itami ne sait
toujours pas renouer avec le génie de son chef-d'uvre
Tampopo ; la faute en incombe au portrait trop rapidement brossé
des principaux protagonistes par trop caricaturaux pour susciter une
véritable identification de la part du spectateur, quelques longueurs et
une fin trop sirupeuse (l'affront du personnel de l'hôtel contre le clan
de yakuza arrivant).
Reste qu'Itami réussit le
difficile pari de réaliser un divertissement populaire et familial sur
un réel tabou de la société japonaise, qui se place
largement au-dessus du lot du nombre de comédies sortant par ailleurs.
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