.La Condition de l'homme 2 - Le Chemin de l'éternité
 
Titre original:
Ningen no joken
   
Réalisateur:
Kobayashi Masaki
Année:
1960
Studio:
Shochiku
Genre:
Drame
Avec:
Nakada Tatsuyai
Aratama Michiyo
Arima Ineko
Yamammura So
dre
Boucherie

Second volet du film-fleuve de Masaki Kobayashi adapté du roman homonyme de Junpei Gomikawa, La Condition de l'homme 2 - Le Chemin de l'éternité dénonce les travers de l'armée japonaise durant la Seconde Guerre Mondiale.

Suite à sa rébellion contre les conditions de travail des ouvriers et prisonniers chinois d'une mine, Kaji est mobilisé comme soldat au front mandchourien pour combattre l'envahisseur russe. Bafoué par les supérieurs hiérarchiques, Kaji s'engage une nouvelle fois dans une lutte contre les injustices ; mais ses idées se heurtent également aux comportements de ses congénères. Envoyé sur le champ de bataille, l'escouade de Kaji s'engage dans une lutte désespéré contre l'avancée des tanks soviétiques. .

Après avoir dénoncé les travers d'une organisation ouvrière et l'exploitation abusive des prisonniers de guerre pour le compte du Japon, Kobayashi s'attaque au corps militaire de son pays. A travers la mobilisation de Kaji au sein même de l'armée, Kobayashi dépeint une nouvelle fois le comportement de l'être humain face à une situation extrême en plus de la bêtise d'une Guerre. Le regard du réalisateur se fait encore plus acide : outre l'abus de pouvoir des hiérarchiques militaires, la cruauté entre congénères est d'autant plus féroce. Les faibles ou hommes peu adaptés à la situation de la guerre servent de souffre-douleurs et faire-valoir aux plus forts. Une première partie de film rappelant fortement le brûlot anti-guerre de Kubrick Full Metal Jacket jusque dans son acte de désespoir ultime en fin de ce premier épisode par le suicide d'un des soldats.

Kobayashi use d'une certaine ironie dans son propos : si dans le premier film, Kaji était accusé de défendre une certaine idéologie communiste par ses idées progressistes, il ira cette fois jusqu'à les combattre, au propre comme au sens figuré. Se mobilisant pour défendre les intérêts des soldats face à un pouvoir hiérarchique abusif, Kaji échoue une nouvelle fois à faire valoir ses idées. Se heurtant à une certaine agressivité de ses congénères, il ira jusqu'à faire une entorse à sa propre idéologie en acceptant la graduation de son poste. Pensant ainsi disposer d'un meilleur moyen pour améliorer l'état des faits de ses subordonnés, il ne sera que le pantin de ses supérieurs et sera accusé par les autres soldats de ne défendre que ses propres intérêts. Finalement, il finit par être envoyé au front même, où il doit empêcher l'avancée des tanks soviétiques (métaphore certaine d'un communisme rampant).

Plus encore que dans le premier épisode, le combat idéologique naïf que mène Kaji est voué à l'échec. S'il avait su gagner une certaine confiance de la part des prisonniers chinois, peu de soldats japonais rejoignent la cause défendue par le jeune homme mobilisé. Kobayashi porte donc un regard totalement désabusé sur la société japonaise et le comportement humain de ses concitoyens. Tous seront - en fin de compte - punis par le châtiment extrême : la mort ; seul survit Kaji pour continuer son combat personnel, qui ne laisse que peu d'espoirs suite au constat amer des deux premiers films. Kobayashi réalise un nouvel opus époustouflant de maîtrise et de savoir-faire. Le roman d'origine trouve sa parfaite transposition à l'écran, tant au niveau du développement des nombreux personnages et intrigues, que par la mise en scène épique. Le réalisateur est autant à l'aise dans les scènes intimistes et en huis-clos, que lors de scènes de foule (le feu de la savane) et des combats (l'attaque finale). Curieux que ce monument du classique n'occupe pas une place plus importante dans l'Histoire du Cinéma Mondial.



 
Bastian Meiresonne