.Hissatsu ! Sure Death !
 
Titre original:
Hissatsu!
   
Réalisateur:
SADANAGA Masahisa
Année:
1984
Studio:
Shochiku
Genre:
Chambara
Avec:
FUJITA Makoto
MITAMURA Kunihiko
AYUKAWA Izumi
NAKAJYOO Kiyosh
i

Pour une bouchée de yen

Première excursion sur grand écran de la populaire série télévisuelle du même nom (1972-1992). Tous les ingrédients de l'original sont préservés, même si la durée bien plus conséquente et les faiblesses scénaristiques nuisent à la parfaite réussite de l'ensemble.

Une organisation de tueurs surentraînés s'attache à veiller sur le bon ordre dans l'enceinte de la ville d'Edo. Citoyens tout à fait normaux de jour, les membres se réunissent – au besoin – la nuit pour punir de la mort tout homme méritant. Leur fragile existence est pourtant d'autant plus menacée le jour où un tueur en série commence à assassiner un à un les différents membres du groupe. Adversaire apparemment enclin à prendre le contrôle de la ville pour son propre profit, les protagonistes principaux n'ont d'autre choix que de tenter de lever le voile sur l'identité secrète de leur adversaire en renforçant leurs propres rangs.

"Hissatsu" (ou "Sure Death") a été une série télévisuelle nipponne très populaire de 1972 à 1992. Basé sur le roman "Shikakenin Baian" de IKENAMI Shotaro, elle a été fortement influencée par la série des "James Bond. Elle compte pas moins de 768 épisodes de 45 minutes, 19 longs métrages TV et plusieurs adaptations au cinéma jusqu'en 1996 (parallèlement, de nombreuses productions similaires tentaient de surfer sur la vague de succès, dont la série populaire "The Hangman" de 1982 à 1986). La longue série, régulièrement renouvelée par de nouveaux acteurs, fonctionne toujours sur un principe identique : un groupe d'assassins, simples citoyens de jour, a pour but de punir de mort toute personne enfreignant la loi ou abusant de sa supériorité hiérarchique. Chaque membre de cette organisation secrète dispose de sa propre manière de tuer, souvent en rapport avec sa couverture sociale : un maçon attaque ses ennemis à l'aide de tuiles, un joueur de shamisen tue à l'aide des cordes de ses instruments ou un spécialiste en acupuncture use d'aiguilles bien placées. Seul changement notable : le degré de violence. Partant d'une idée de départ pas forcément tendre, la représentation graphique est allée crescendo au fur et à mesure des épisodes; la seconde saison se complaisait même à faire inventer les meilleurs moyens de supplicier les victimes – jusqu'au jour où un déséquilibré s'en inspira pour commettre un vrai crime dans la réalité. Les producteurs ordonnaient immédiatement d’édulcorer le propos et d'apparenter les meurtres à la seule "réponse" à de flagrants injustices. Il n'empêche que le degré de violence est resté élevé tout au long des années et a très certainement influencé nombre d'autres productions au cours de son existence.

"Sure Death" – le film s'apparente à un double épisode (légèrement rallongé, car durant près de deux heures) de la série télévisée. Tous les ingrédients sont réunis pour permettre aussi bien aux loyaux fans, qu'aux jeunes novices de s'initier aux aventures de la bande organisée. Un léger avantage est donné aux aficionados en raison du peu de temps d'exposition accordé aux différents protagonistes (en surnombre par rapport à la série télévisuelle) et l'entrée en matière un peu abrupte pour celui peu affilié à leur univers particulier. L'intrigue – par contre – est relativement simple à suivre, les assassins cherchant tout d'abord à comprendre les raisons des meurtres avant de se liguer contre l'invisible ennemi et de renforcer armement et équipe. Curieusement, alors que la première partie démarre comme une enquête sérieuse, le ton du film bascule lors de l'introduction de nouveaux personnages. Alors que les uns s'entraînent à parfaitement maîtriser leurs armes (lancer de tuiles pouvant décapiter un adversaire) ou cherchent de nouveaux moyens de tuer (dressage d'un oiseau piquant l'ennemi de son bec empoisonné !!!), d'autres maîtrisent de pouvoirs véritablement surhumains (l'art de se déplacer sous terre). On ne sera donc nullement impressionné de voir surgir à un moment pour le moins inattendu une sorte de capsule sous-marine – que n'aurait pas renié Jules Verne – emmenant les protagonistes principaux au fond d'une petite mare sur fond de poissons rouges filmés en gros plans. Un pur moment de délire kitsch très peu en lien avec ce qui précédait. En revanche, les auteurs se sont efforcés de garder une caractéristique de la série : l'humour occasionné par la difficile double existence menée par les différents membres; notamment d'un marchand, qui doit tout mettre en œuvre pour écarter les soupçons de son envahissante belle-mère. Des authentiques moments comiques réussis, qui contrebalancent quelque peu le climat oppressant par ailleurs.

En revanche, le passage du petit sur grand écran ne s'effectue pas sans quelque mal – et notamment dans le changement de format. Clairement divisé en plusieurs parties inégales – dont notamment la seconde partie au changement de ton marqué – l'intrigue se disperse par trop en de nombreuses sous-intrigues sans autre intérêt que de rallonger artificiellement la durée du métrage (notamment toute la scène du chat…). La logique se perd également au fur et à mesure de l'intrigue jusqu'à déraper dans un pur délire familial avec l'apparition du curieux sous-marin – une trouvaille très peu en phase avec le sérieux propos et la violence certaine par ailleurs. Reste, que les différents personnages sont réellement attachants; que l'inventivité quant aux multiples manières d'abattre un homme est incroyable et que le final au théâtre est un pur moment de mise en scène parfaitement maîtrisée. Un film qui donne envie de suivre bien d'autres aventures de cette organisation d’assassins.

 
Bastian Meiresonne