.Invisible Man : Rape !
 
Titre original:
Tomei ningen : Okase!
   
Réalisateur:
HAYASHI Isao
Année:
1978
Studio:
Nikkatsu
Genre:
Pinku-eiga
Avec:
SATO Teruaki
ASUKA Yuko
Mari Maria
SHIMA Izumi
dre
Transparent

Figure emblématique du cinéma fantastique accouchée en fin de 19ème siècle, la créature de HG Wells a fort tôt suscité l’intérêt des scénaristes et connu nombres de déclinaisons plus ou moins transgressives. Reconverti pour un marché nippon qui s’inspirait alors généreusement outre-pacifique, la série des trois Tomei ningen (l’Homme invisible, 1949-57) exhalait une douce senteur d’entourloupes, de cabarets et de rues sombres. Cette série précurseur dans un genre fantastico-nippon en pleine construction ne connut étonnamment pas de suites directes. En lieu et place, le cinéma fantastique local assimilait à sa propre mode ces influences étrangères en les mêlant aux stigmates du second conflit mondial ; voir les films de la Toho au sous texte nucléaire tel la vague Kaiju initiée par Godzilla en 1954 ou les thrillers H-Man, Human Vapour ou Secret of Telegian. La révolution sexuelle passant par là, c’est avec Dr Eros en 1968 qu’on retrouve bien plus tard la thématique de l’homme invisible dans une variante rose impulsée par l’omniprésent producteur Okura. Produit en 1978 par la Nikkatsu durant sa période roman-porno, Invisible Man : Rape ! se révèle être l’un rare rejeton érotique à prendre ancrage dans le fantastique (on citera aussi Lady Momoko de Koyu Ohara sorti deux ans plus tard).

En pleine vague Violent Pink, sous genre du roman-porno basé sur les agressions sexuelles, le film de Isao Hayashi prend une voie alternative en revêtant les atours d’une comédie délurée aux accents psychédéliques fatigués.  Après un générique fripons façon manga so 70 ‘s, l’entame surréaliste nous dévoile un charmant duo de pop-idols faisant irruption hors du poste de télévision d’un otaku qui s’attache manu-militari à dévêtir les infortunées demoiselles ( !). Ce qui s’avérera n’être un rêve alcoolisé laisse place à un canevas archi-linéaire aux figures imposées. Soit l’histoire d’un chercheur à la vie de couple sans histoire qui découvre dans son laboratoire la formule d’un breuvage pouvant le rendre invisible. S’ensuivent sans entrain les scènes attendues où l’homme picore sa jolie secrétaire, fréquente les bains publics féminins ou honore une conférencière sur scène lors d’un congrès scientifique. Une mollesse chronique qu’Hayashi double d’une linéarité plombante et d’une réalisation plan-plan en mauvais pilotage automatique. Autant de mini-sketchs empilés sans malice ou sens du détournement de la part du réalisateur de la bien plus déjanté série des Shameful school (1970-71).

Reste une vision toute japonaise des rapports de séduction où le viol routinier s’intègre dans un quotidien banal; une peinture qu’un second rôle de femme perverse contrebalance de ses assauts saphiques. Notre homme invisible doublé de sa compagne d’aventure s’avéreront les entremetteurs involontaires de personnages qui finiront, dans un happy-end de bon aloi, main dans la main. De cette longue heure encombrée d’ébats sexuels forcément incongrus et trop rarement coquasses viendront quelques fulgurances pécasiennes comme ces scènes où le membre viril du ‘héros invisible ’ se meut dans les airs ou encore cette délicate attention lorsqu’il tend du papier hygiénique à sa future victime suivie jusque dans les toilettes d’un nightclub. Le résultat témoigne de la difficile adéquation du genre pinku aux formules fantastiques pourtant à priori épicées. Une transposition brute d’un schéma classique du genre qui se croit dispensée d’ironie transgressive sous couvert d’un pitch alléchant ici fort mal exploité.

 
Martin Vieillot