.Lady Vampire
 
Titre original:
Onna kyuketsuki
   
Réalisateur:
Nakagawa Nobuo
Année:
1959
Studio:
Daiei
Genre:
Horreur
Avec:
Amachi Shigeru
Wada Keinnosuke
Ikeuchi Junko
Nakamura Torahiko
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Vampire fatigué 

Phénomène typique de l'assimilation nippone, le mythe du vampire s'est trouvé quelque peu dénaturé lors de ses adaptations cinématographique locales. Avec Goke et Living Skeleton, Lady Vampire propose lui aussi sa variation inédite ; curieux télescopage entre vampirisme et lycanthropie, le vampire selon Nakagawa se meut de jour comme de nuit et ne craint que la lumière de la pleine lune. Lady Vampire n'est pas le premier du genre de Nakagawa, trois ans auparavant il signait déjà avec Vampire Moth une œuvre semblable, une histoire de mannequin poursuivie par un étrange créature masquée.

Lady Vampire confirme les lacunes du réalisateur en matière de direction d'acteurs. Si avec ses œuvres historiques (Ghost of Yotsuya Kaidan, Ghost of Kasane Swamp), ce défaut fut souvent atténué sous couvert d'un académisme de rigueur, ses œuvres contemporaines souffrent d'un manque évident d'implication. Direction approximative et théâtralité font sérieusement peser le poids des ans. Le même manque de rigueur se fait sentir dans une trame où l'on navigue sans cesse entre film policier (un voleur et son butin) et film fantastique (une mère réapparaît subitement vingt ans après sa mystérieuse disparition). Très inspiré de l'esthétique gothique de ses homologues occidentaux, rien ne distingue vraiment le film si ce n'est sa provenance. Filmé dans un noir et blanc très sage et classique, on ne perçoit qu'en de rares moments la patte du réalisateur qui allait donner naissance au célèbre Jigoku. Pas de superbes fulgurances visuelles, seul ici et là quelques travellings travaillés suggérant une présence invisible, ou encore de beaux jeux de lumières et de clairs-obscurs L'élément fantastique s'il est bien présent se trouve complètement dilué dans une banale intrigue où se télescopent joyeusement tout les poncifs du genre mêlés d'incohérences notoires. Lady Vampire souffre d'un rythme inégal, des moments creux suivis de brusques embardées qui échouent à instaurer durablement une atmosphère fantastique. Le mélange des genres ne prend pas et ces sauts du coq à l'âne peine à impliquer le spectateur Pire, Nakagawa embrouille encore plus son récit avec des flash-back maladroits où l'on apprend le fin mot de l'histoire (une sombre histoire de malédiction remontant à plusieurs siècles). On se souviendra surtout d'un bien curieux duo de personnage : un vampire accompagné de son acolyte de nain qui déambulent on ne sait trop où, comme lorsqu'ils vont se réfugier dans une bar souterrain pour se protéger de la lune subitement découverte par les nuages.

Le final est symptomatique de cet imbroglio ; tout ce beau monde finira par se retrouver dans un château dissimulé dans les montagnes, l'occasion pour Nakagawa de retrouver son sens de l'esthétique avec quelques jolis plans baroques. Le pénible affrontement final se traîne dans d'interminables plans séquences où se croisent policiers, voleur et vampire. Combats fatigués et faiblard décors de studio, Lady Vampire se conclut comme il a débuté. On retiendra certes quelques bons moments fantastiques, mais difficile de ne pas être déçu par ce qui n'est qu'un banal film de genre sans grande inspiration. Maigre consolation, on découvrira lors de ce final que les vampires nippons ont définitivement quelque chose d'unique!
 
Martin Vieillot