Titre
original:
Sandaju no Otoko |
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Réalisateur:
SUZUKI Seijun |
Année:
1961 |
Studio:
Nikkatsu
Genre:
Western |
Avec:
NITANI Hideaki
MINAMIDA Yoko
ODAKA Yuji
ASHIKA Izumi
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Egaré
De la carrière de Seijun Suzuki à la Nikkatsu, on retient surtout la fantastique période 63-66 où le réalisateur enchaîna avec une réussite artistique insolente les classiques dynamitant les codes du cinéma de genre. Pourtant, l’inévitable filtrage ayant amené ses plus célèbres films en Occident a eu aussi pour effet de refermer avantageusement le couvercle sur certains œuvres de commandes profondément médiocres où l’on devine un réalisateur peu motivé à travailler un matériau de base rachitique.
A l ‘œuvre depuis 1956, Suzuki signe avec Man with a shotgun (1961) son 19ème film. S’il a déjà signé Naked woman and the gun (1957) sur un postulat similaire mêlant figure forte et arme offensive (un sous genre alors en vogue, voir Rose and Queens of gun du concurrent ShinToho daté de 1958), Man with a shotgun fait vite mentir son titre tant la dimension mythologique de l’arme du personnage est ici peu exploité. En fait, le film de Suzuki est à rapprocher d’un des sous-genre les plus curieux des mukokuseki akushun de la Nikkatsu : le western nippon. Un genre hybride par excellence, synthèse improbable d’influences hollywoodiennes mêlant western avec des relents de films James Deanien. On citera les neuf Wataridori (58-62) avec le charismatique Akira Kobayashi en vagabond romantique guitare en bandoulière errant dans les plaines d’Hokkaido ou encore Fast-draw Guy (61) avec un Jo Shishido mémorable de nonchalance assumant pleinement le statut bâtard du genre. Loin d’égaler le charisme de ses illustres compagnons avec qui il forme le New Nikkatsu Diamond Trio, Hideaki Nitani endosse ici la défroque d’un bellâtre romantique s’aventurant dans un no man’s land tropical avec camps d’ouvriers aux allures patibulaires, plaines désertiques propices aux balles perdues et inévitables saloon où se déroule le rituel éméché des joyeux bourres-pif.
Genre formulatique par excellence, Man with a shotgun évite tout progression narrative en se construisant exclusivement sur des rencontres et confrontations entre personnages amicaux ou vindicatifs : scènes de bars finissant en bousculades, camaraderie bon enfant, machinations tordues et ses lots de duel au fusil. Si Detective Bureau 2-3 brillait par son sens du détournement, Man with a shotgun ne sent que trop la routine dans son accumulation de séquences désinvoltes à la dramaturgie bien trop appuyée. Dans Fast-draw Guy, Jo Shishido sauvait de sa présence l’entreprise, ici Hideaki Nitani parcours d’un air mollasson un script dénué de toute ambition. Film purement commercial, le statut divertissant n’est pourtant pas rempli : les bastonnades lassantes et sans tonus, les gunfights rares, les rôles féminins absents et les savoureuses digressions musicales inexistantes. Tout juste retiendra on la séquence introductive où Nitani s’impose avec la maîtrise de son arme, et les plans où il se jauge face à un alter-égo elvisien pour les yeux d’une belle pépée et de quelques bijoux. Malgré le statut décalé du genre, on trouve un Suzuki dilettante aussi bien peu inspiré par son héros (on ne répétera jamais combien la nonchalance de Jo Shishido participait au dynamitage des codes figés de la Nikkatsu) que rétif à un travail formel réduit ici au minimum syndical (mouvement d’appareil inexistant, découpage paresseux, sens chromatique absent). Si dans l’exploration de la genèse suzukienne Underworld Beauty sorti trois avant était digne d’intérêt, Man with a shotgun est un bien piètre résultat, un accident de parcours sans conséquence dans un genre mort-né. |
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