.Onibi
 
Titre original:
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Réalisateur:
MOCHIZUKI Rokuro
Année:
1997
Studio:
Gaga inc
Genre:
Yakuza-eiga
Avec:
HARADA Yoshio
KATAOKA Reiko
AIKAWA Sho
KITAMURA Yasushi
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Sur le retour 

Si Onibi entretient autant de similitudes avec Another Lonely Hitman, c'est qu'il était à l'origine conçu comme sa suite alternative cherchant à capitaliser sur son succès en salle et son bon écho critique. Rokuro Mochizuki changea ses plans suite à sa rencontre fortuite et marquante avec un authentique yakuza tête-brulée qui l'orienta vers une démarche plus introspective. Dès lors, on ne s'étonne plus de retrouver une trame quasi-identique où un yakuza, sortant de l'ombre après de longues années derrières les barreaux, réapprend à vivre et se trouve confronté à un quotidien qui à inévitablement changé. Sa rencontre avec une femme l'aidera à surmonter son acclimatation jusqu'au jour ou son passé le rattrapera de façon tragique.

Onibi confirme la maturation d'un cinéaste qui laissait alors entrevoir un regard distancié et différent sur le monde contemporain des yakuza . S'il n'évacue pas totalement une fascination patente pour le milieu de la pègre, Mochizuki prend ici du recul et isole son personnage dans ses moment creux. La bonne idée du film c'est d'avoir engagé l'acteur Yoshio Harada, figure majeure du cinéma de genre depuis les années 70, pour interpréter le personnage de Kunihiro. Harada prête sa gravité et son romantisme animal à une figure mafieuse en pleine reconstruction. Un homme cherchant désormais le droit chemin et s'éreintant aux basses besognes ouvrières dans des chantiers et imprimeries. Le milieu mafieux ne tient ici qu'une place accessoire, un monde où les berlines de luxe, les intérieur cossus, les jeunes yakuza arrivistes adeptes de costumes de marques ne sont que pur décorum. Mochizuki insuffle un peu de vie dans ce monde et aère ses habituels décor urbains à l'aide plans distants où le ciel, la nature tiennent une place prépondérante. Motifs récurrents, les ballades et moments complices du couple orientent l'œuvre vers un portrait de couple atypique où un vieux loup s'entiche d'une demoiselle qui lui révélera ses blessures intimes.

La veine romantique confère un rythme non-chalant propice à l'introspection. Si le personnage de Kunihiro paraît de prime abord stable et épanoui, il trahit sa fragilité à fleur de peau lorsque son amante disparaît soudainement. Ancien voyou, le personnage fait montre de l'inutilité de la violence et du mérite du pardon, Mochizuki détournant ainsi les codes inhérents du genre toujours prompt à glorifier ses icônes vindicatives. Après une entame convaincante, Onibi glisse lentement vers un portrait de couple plus convenu et attendu. Au fur et à mesure de l'avancée du réct, Kunihiro se trouve inévitablement rattrapé par son passé criminel et sa réputation flatteuse qui suscite les convoitises de gang auquel il ne saura résister. Cette tentation du basculement vers l'autre monde, celui de ses démons, confère au récit une tension souterraine qui ne demandera qu'à s'extérioriser.

Mochizuki, indéniablement appliqué, soigne ses cadrages et ambiances. Malheureusement par plusieurs fois, il pèche aussi par excès de confiance et de maladresse : de moments creux où le beau score lancinant se fait trop insistant et dévoile un romantisme maniéré, des personnages secondaires superficiels (le personnage de l'homosexuel), des plans élégants mais trop recherchés pour être naturels, des digressions esthétisantes malvenues (la scène de la piscine). Cependant, Onibi sait aussi ménager de vrais instants émouvants où Kunihiro laisse transparaître sa fatigue de la vie derrière un masque d'impassibilité. Un héros profondément humain, viril et magnétique, avec ses moments de faiblesses et de doutes. Dans son final, Mochizuki fait rebondir judicieusement l'œuvre en révélant brutalement la vraie nature violente de son personnage donnant à posteriori un nouveau regard sur la relation amoureuse qu'il entretient.

Film inégal, Onibi confirme néanmoins les progrès d'un cinéaste sachant insuffler une épaisseur dramatique crédible à ses personnages. En marge d'un genre ultra-codifié, sa tonalité mélancolique et introspective dépareillent. Quelques maladresses naïves et passages routiniers n'entachent pas la bonne impression d'ensemble. Bon artisan, Mochizuki accouche au final d'une œuvre mineure mais séduisante.
 
Martin Vieillot

Onibi est disponible chez Artsmagic