Titre
original:
Kyonestu no
kisetsu |
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Réalisateur: KURAHARA Koreyoshi |
Année: 1960 |
Studio: Nikkatsu
Genre: Seishun-eiga |
Avec:
KAWAJI Tamioi GO Eijii MATSUMOTO
Noriko CHISHIRO Yuko |
dre |
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Animal
Au sortir de la seconde guerre
mondiale, l'influence américaine eu de profondes répercussions
sur l'industrie cinématographique nippone. Dans un premier temps les
autorités transitoires alors en place contrôlèrent d'un
il attentif les contenus dits sensibles allant jusqu'à interdire
provisoirement les jidai-geki (films historiques) suspectés de
véhiculer une dangereuse philosophie nostalgique et pro-nationaliste du
régime fasciste fraîchement déchu. Si l'emprise
américaine se relâcha ensuite au milieu des années
cinquante, l'influence culturelle made in USA resta pourtant alors
indissociable d'un certain cinéma populaire: films de super
héros, décalques de polars noirs mais aussi et surtout les
seishun-eiga (films de jeunesse) de la Nikkatsu. Basé sur un
star-system bien rodé et très vite en place, la compagnie connu
un formidable succès faisant écho aux désirs
d'extériorisation et d'identification de la jeunesse de l'époque.
L'omniprésence et la fascination de l'imagerie en provenance d'outre
Pacifique s'installèrent alors durablement dans les salles obscures de
la Nikkatsu : simili-cowboy romantiques guitare en bandoulière (la
série des Wataridori), héros gominés adeptes de
bolides et de belles pépées et autres gangsters
charismatiques.
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De par sa description d'une
jeunesse nihiliste en quête d'elle même, Season of Heat
témoigne de l'influence patente de films tel la Fureur de Vivre
et son icône James Dean. Or à y regarder de plus près, son
ancrage se situe plutôt dans une mouvance plus générale,
celle de la nouvelle vague nippone qui explosa alors chez les
indépendants (Passions juvéniles de Ko Nakahara en 56,
Contes cruels de la jeunesse de Nagisa Oshima en 60). Si le canevas est
celui d'un pur film de genre de la Nikkatsu (les tribulations d'un jeune
paumé), Season of Heat se transforme progressivement en une sorte
de radiographie de la jeunesse de l'époque avec ses aspirations et ses
doutes. Curieux résultat d'un film surfant sur les conventions du genre,
là se situe tout l'intérêt de l'uvre, Koreyoshi
Kurahara naviguant constamment entre histoires de fesses et de petites frappes
et une mise en abyme plus pernicieuse qui éclate littéralement
lors de la séquence finale. Le jeune Tamio Kawaji y incarne un
paumé qui, sorti de prison, va bientôt voguer de magouilles en
romances avortées. Un véritable animal aux nerfs à fleur
de peau se mouvant et gesticulant dans des danses désarticulées,
suant par toutes ses pores sous la chaleur infernale de l'été. Sa
présence électrique est ici particulièrement
impressionnante, une composition habitée qui insuffle une gravité
souterraine permettant au film de dépasser son statut de simple film de
genre. Kurahara dépeint les méfaits d'un jeune voyou, volant de
belles voitures, haranguant les jeunes demoiselles qui croisent son chemin,
allant même jusqu'à enlever et violer la fiancée de celui
de l'envoya un temps derrière les barreaux.. Kurahara ne se pose pas en
juge, cet homme abject en apparence dissimule sous son armure de bravades un
être en proie à une détresse et une solitude terrible. Sans
discours moralisateur, le film installe progressivement le doute chez le
spectateur en révélant les failles béantes du
héros. Cette ambiguïté permanente, ange ou démon,
insuffle une tension permanente à l'ensemble. Au détour d'un plan
bref sur son regard, Kurahara sonde le doute qui ronge son personnage. En
s'entichant d'une jeune bourgeoise, cet homme de rue va se confronter à
la douloureuse réalité de sa condition qui lui revient alors en
plein visage. Incapable de se tenir en société ni même de
nouer des amours ou amitiés, son chemin finit immanquablement par des
fugues telles ces échappées incontrôlées le menant
sur des plages où il nage à l'horizon jusqu'à
épuisement Plus qu'une fureur de vivre, son agitation, sa course
perpétuelle reflètent surtout la fuite en avant d'un être
sans repère, l'éclat malicieux de ses yeux faisant place à
celui d'un fou dangereux en liberté - ou d'un simple extraverti - jamais
le réalisateur ne tranche.
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Typique de bande-son de la
Nikkatsu de l'époque, le jazz omniprésent entretient la teneur
schizophrénique de l'ensemble. Des belles envolées classieuses de
trompettes portant les escapades du héros contrastent avec la
réalité plus dure représentée à
l'écran. Témoignage direct de l'époque, Season of
Heat exhale la parfum du Tokyo d'après guerre, quelque part entre la
violence de la rue et les nombreux jazz-club, lieux introspectifs où le
héros aime à s'oublier. Cette tonalité 'free' se ressent
aussi et surtout grâce à un montage alerte toute en
nervosité. Du générique d'ouverture qui en deux minutes
narre l'arrestation, la détention puis la libération du
héros, jusqu'à au premier quart, le rythme
frénétique frappant de modernité baisse progressivement de
régime au fur et à mesure qu'apparaissent les fêlures de
son personnage, non sans s'offrir de nerveuses envolées. La
caméra au diapason entretient cette dualité, des mouvements
d'appareils à l'épaule souples mais nerveux retranscrivent
l'énergie des interprètes et des situations (virées en
voiture, rixes,..), des plans posés plus distants inscrivent le
personnage en prise directe dans son environnement. Enfin cette opposition
très musicale, quasi-binaire, se retrouve dans une belle photographie
noir et blanc très contrastée, l'accablant et aveuglant soleil
alternant avec les ambiances tamisées des jazz-club
souterrains.
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Season of Heat
témoigne de la belle énergie d'un réalisateur
évoluant sans cesse aux frontières du genre. Une remarquable
prestation habitée de Tamio Kawaji épaulée d'une
réalisation moderne en phase avec son sujet, le film de Kurahara, tout
en oppositions quasi-musicales, procède à une étonnante
mise en abime d'un personnage en marge sans jamais le défaire de sa
troublante et précieuse ambiguïté. |