Titre
original:
Tousatsu
Repooto: Insha ! |
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Réalisateur: SATOU Hisayasu |
Année: 1991 |
Studio: -
Genre: Pinku-eiga |
Avec:
SUGISHITA Naomi FUKATA Miki TAKAGI
Reiji |
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Troubles visions
Par son coté sulfureux et
provocateur, Hisayasu Satou n'est pas sans évoquer un pendant
contemporain du turbulent Kouji Wakamatsu. S'il délaisse la veine
politisante de son aîné, on y retrouve la même propension
à scruter d'un il inquisiteur la libido torturée de ses
concitoyens. A coté d'uvres frondeuses
délibérément choquantes comme Wife Collector ou le
zoophile Horse Woman Dog, il réalise avec des films tel Turtle
Vision des expériences virant vers l 'épure et
l'expérimental. Principal limite du cinéaste, son univers intime
et fascinant reste trop hermétique pour pouvoir prétendre
à une véritable réflexion digne de ce nom. Sa
prédilection pour les scénarios volontairement embrouillés
n'aide en rien à transcender un matériau plus mince qu'il n'y
paraît. Pourtant, films après films, Satou continue
imperturbablement à ressasser ses obsessions dans ce qui ressemble fort
à une fascinante thérapie pour le moins singulière.
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Versant apaisé de sa
filmographie, Turtle Vision porte toutes les caractéristiques de
son auteur. Si le thème du voyeurisme est comme souvent présent,
il revêt ici moins une forme de déviance sexuelle qu'une
illustration patente de l'incommunicabilité au sein d'une
société aseptisée. Le monde dépeint par Satou
frappe surtout par sa violente froideur. Comme nappé d'un voile laiteux,
les personnages se meuvent dans un environnement familier qui aurait
abandonné ses dernières traces d'humanité. Une ville
désertique où de rares êtres errent machinalement tel des
spectres survivants d'un cataclysme ravageur. En quelques plans, Satou plante
son décor dans des extérieurs urbains désertés
où le béton emprisonne insidieusement ses habitants. Dès
lors, les cellules intimes que sont les appartements représentent le
dernier rempart contre l'aliénation au monde. Les agressions
extérieures y sont illustrées par le biais de menaces abstraites
(voir cette scène où une femme rentre dans une crise
d'hystérie en gazant un insecte) ou bien réelles (une intrusion
d'un violeur qui tabasse violemment la locataire). Dans cet univers
quasi-clinique, l'ascétisme fait écho au vide existentiel de ses
personnages. Satou établi d'ailleurs un parallèle évident
entre le monde réel et l'univers des chambres stériles qui semble
ici inexorablement se répandre. Personne principal d'un récit
porté sur le mode de l'errance et de la divagation, Akiko passe ses
journées de travail cloîtrée dans un laboratoire,
l'il hagard fixé sur son écran d'ordinateur (voir cette
scène où elle écrit inconsciemment un laconique message
d'appel au secours figé au centre de son écran puis bientôt
submergé sous le flots des données). Femme en apparence
tranquille, sa relation familiale est au plus mal depuis que son mari
tombé dans le coma est laissé pour mort dans un état
végétatif dans une chambre d'hopital. Elément catalyseur
des évènements à venir, cet homme incarne ici une
dimension métaphorique comme un miroir tendu à sa femme. Pour
renforcer le coté énigmatique de ce personnage, Satou l'affuble
d'une étrange paire de lunettes qui telle un puissant motif graphique
renvoie inexorablement toutes tentatives de sonder son âme (nombreux
plans sur le visage d'Akiko se reflétant sur le visage de son mari) .
Bloc monolithique imperturbable, il renvoi sa femme à sa propre
nullité. Dès lors, elle n'aura de cesse de se perdre dans ses
quêtes voyeuristes comme un palliatif à son vide intérieur.
Armée de son détecteur radio et de micro-espions, elle traque les
ondes et discussions d'un couple qu'elle jalouse secrètement. Une
curiosité tout d'abord désintéressée qui se mue
bientôt en son unique lien social tangible lorsqu'elle s'enfonce dans le
jeu du chantage et de la manipulation.
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On retrouve là encore
l'opposition extérieur/intérieur qui confère à
l'ensemble une tension inquisitrice qui finira finalement par se retourner
contre son instigatrice dans une séquence où elle retourne et
éventre littéralement son appartement. Si Akiko se morfond dans
une déprime quotidienne, son collègue et pendant masculin
constitue son reflet fidèle. Incapables d'exprimer autres choses de
rares mots routiniers, leur relation professionnelle fera gonfler sa
frustration qui ne pourra plus d'exprimer que par la déviance (une
traque obsessionnelle) et la violence (déguisé en voleur il tente
à plusieurs reprises de rentrer par effraction dans son appartement afin
de la violer). Si la dimension érotique est ici bien entendue
prégnante, son caractère relativement avare et
périphérique est plus étonnant. Jamais le désir
primitif 'pur' n'est le moteur du récit, les scènes sexuelles
constituent l'aboutissement logique d'un long ressassement et d'une
dérive psychologique. Satou se focalise principalement sur la langueur
de ses protagonistes. Jalousies et frustrations se construisent souterrainement
sans jamais dépareiller de l'effrayante tonalité morbide de cet
univers stérile. Les ébats amoureux témoignent de cette
tonalité d'ensemble, tantôt exutoires bestiaux et
égoïstes dans des séquences routinières ou moments
d'apaisement comme dans l'introduction du film où Satou dans un style
hérité de Wakamatsu colle sa caméra au plus près
des corps, scrutant et isolant les détails anatomiques (langues,
aisselles, seins,..) dans une veine très charnelle. Un
égoïsme dont se fait l'écho une séquence gore
où le mari du couple apparemment 'sain', la carotide transpercée
d'un coup de tournevis vengeur de Akiko, s'en va entraîner sa compagne
dans la mort. A cette dimension de thriller désintéressé,
Satou insuffle un regard parallèle dont on ne sait s'il
représente l'aspect véridique des évènements.
Typique de l'obsession du réalisateur pour l'image sous toutes ses
formes, une cassette vidéo mystérieusement arrivée au
domicile d'Akiko va brouiller les pistes en conférant une veine onirique
au film. Le visionnage de la dite vidéo sera l'occasion de
véritables 'trip' introspectifs où une faille spacio-temporelle
s'ouvre l'espace d'un instant. Le point de vue se renverse alors allant
jusqu'à se placer à l'intérieur même de la
télévision. Bardant l'écran de filtres saturés et
de lumières agressives, Satou matérialise la frontière
tenue du souvenir/fantasme où des réminiscences enfouies refont
violemment surface : souvenirs du mari du temps de son vivant, évocation
d'un avortement destructeur, viol fantasmé. Embrouillant passablement le
récit, ces passages graphiques puissants renforcent malheureusement
l'aspect fumeux d'un projet où la symbolique est utilisée sans
grande finesse.
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Exemple typique de pinku-eiga
témoin des ressassements de son auteur, Turtle Vision propose une
vision désabusée d'une société
désincarnée. Si le dispositif voyeuriste de l'ensemble permet de
belles idées sur les liens invisibles liant ses protagonistes (belle
séquence mélancolique où, cloîtrée dans sa
voiture, Akiko fredonne une chanson qu'elle intercepte dans un appartement
voisin) tout en conférant une tension souterraine de thriller, Satou se
perd inutilement dans des divagations au propos maladroit et embrumé.
S'il appuie l'errance de ses personnages, le canevas paresseux n'évite
pas l'ennui d'un exercice de style heureusement court (une heure) qui
allongé, se serait irrémédiablement effondré. Une
tare insurmontable pour beaucoup qui n'empêchera pas cependant les
amateurs d'apprécier l'effrayante tonalité morbide du film ainsi
que de belles fulgurances tels ces plans cliniques, dérives
onirico-expérimentales ou encore cette conclusion maladive où
Akiko tranche la gorge de son mari dans un ultime témoignage
d'amour. |