.Wicked Priest 5 : Drinking, Gambling and Women
 
Titre original:
Gokuako bozu : nomu utsu kau
   
Réalisateur:
SAITO Takeshi
Année:
1970
Studio:
Toei
Genre:
Matatabi No Mono
Avec:
WAKAYAMA Tomisaburoi
SUGAWARA Bunta
SHIMURA Takashi
MACHIDA Kyosuke
 dre
Les dés sont jetés

Cinquième et ultime volet des courtes aventures du moine assassin, qui avait finalement montré quelque intérêt au cours de ses derniers épisodes. Une intrigue plus approfondie et un savant dosage d'humour, de sexe et de violence font de cet ultime avatar un divertissement tout à fait réussi.

Après avoir été dépouillé de ses biens par une belle et maligne joueuse de dés, Shinkai se retrouve malgré lui entraîné dans un sombre trafic de transports routiers. Donnant une nouvelle fois de sa personne, le moine affronte maints adversaires plus dangereux les uns que les autres et prouve même un talent certain pour les rôles de composition.

La série des Wicked Priest n'aura donc pas réussi à trouver son public et le cinquième épisode sonnera finalement son glas. D'autant plus regrettable, que les deux derniers épisodes comptaient parmi les plus intéressants et laissaient entrapercevoir de réelles capacités à explorer l'univers délirant de son personnage. Le seul tort aura été de ne pas avoir suffisamment soigné les scénarii dès le départ et trop vouloir imiter ce qui avait déjà été maintes fois transposé auparavant sur grand écran. Créé en plein boom des séries de yakuzas errants, les auteurs du moine assassin avaient trop voulu loucher du côté de Zatoichi. Univers, personnages et intrigues se ressemblent autant que les personnages principaux - et frères à la vraie vie; mais là où le masseur aveugle avait été servi par de brillants scénarii en début de saga, afin de poser les bases nécessaires au futur développement, Wicked Priest n'avait connu tel traitement de faveur et s'était davantage concentré sur le recyclage éhonté des principaux ingrédients assurant le succès de produits concurrents. Saupoudré d'une bonne pincée d'exploitation et des principaux formules à succès de son époque - violence graphique exacerbée et libido libérée - le public ne s'était pas mépris sur le côté définitivement mercantile de l'entreprise douteuse. La qualité relative des deux derniers épisodes arrivaient donc trop tard et n'avaient su conquérir une audience ayant déjà désertée les salles depuis longtemps. Les seuls regrets de cet enterrement précipité ne se font donc moins par un quelconque attachement à l'univers délirant du moine assassin, que par dépit des occasions manquées clairement perceptibles au cours de ce dernier épisode - sans parler de l'irrésolution des affrontements à répétition entre les ennemis jurés Shinkai et Ryotatsu. Ce cinquième volet est donc servi par une intrigue un brin plus étoffée qu'auparavant. La guerre des transporteurs routiers reflète une certaine économie impitoyable et notamment au cours de la seconde moitié de la période Meiji. Une fois de plus, les hautes instances sont corrompues jusqu'à l'os et oppressent un petit peuple dépourvu des moyens nécessaires à la survie. A travers sa lutte - au départ bien involontaire - Shinkai se pose donc comme le porte-parole d'une population défavorisée et opprimée, une direction certainement intéressante à emprunter par des scénaristes plus inspirés. En l'état, cette piste est vite abandonnée au profit des poncifs plus classiques de la série.

Il n'empêche qu'en-dehors du fil conducteur plus sérieux que d'accoutumé, le mélange entre humour, scènes de sexe et combats est particulièrement réussi. A chaque fois, que le propos manque de tomber dans un certain pathos, de séquences comiques rappellent qu'il s'agit bien d'une grosse pantalonnade populaire et redonnent la part belle à Shinkai. Outre les moments véritablement vaudevillesques - notamment à travers quelques scènes coquines gratinées - les auteurs offrent à leur acteur principal la merveilleuse occasion de s'illustrer dans la pure comédie. Ainsi, WAKAYAMA apparaît alors au détour d'une irrésistible scène de bal dans le rôle d'un commandant militaire, que n'aurait pas renié un Peter Sellers, ni un Molière pour son Bourgeois Gentilhomme. Véritable moment de détente, toute la scène du bal est également un grand moment parodique des plus connus mélodrames hollywoodiens. Enfin, la relation orageuse entre Shinkai et la rusée Ogin renvoie directement à l'implication étroite de WAKAYAMA sur une autre série de la même époque, celle des Red Peony Gambler. L'action n'est pas en reste avec de nombreux affrontements contre une ribambelle d'adversaires ou en face à face avec des personnages pittoresques et hauts en couleur. Il est d'ailleurs regrettable, que les chasseurs de tête de Shinkai n'aient pas été davantage approfondis, les deux seuls adversaires semblant tous droits sortis d'un manga. Enfin, un épisode de la série ne serait pas complet sans le traditionnel combat final entre Shinkai et son nemesis Ryotatsu. Leur - finalement - ultime affrontement sera parmi les plus beaux de la courte saga, même si une nouvelle fois inutilement gâché par un irritant effet de ralenti totalement inutile. Le moine assassin semble même réussir à percer une oreille de son adversaire, ce qui aurait inauguré une intéressante variation dans leurs combats à venir, Ryotatsu étant du coup sérieusement handicapé.

L'un des meilleurs épisodes démontre également les étroites imites de la série : contrairement au personnage de Zatoichi, le moine assassin manquait cruellement de personnalité à explorer - ce qui constituera également le principal défaut du futur Hanzo the Razor dans le même esprit. Si le présent volet de ses aventures reste certainement plaisant à regarder, il est loin en-dessous des qualités atteintes par la saga des Zatoichi ou de l'intérêt d'un Baby Cart. Une petite série sans grande prétention - ni intérêt.

 
Bastian Meiresonne