.Cinéma indépendant & Art Theatre Guild
 
 
De l'importance du contexte

La définition du terme ‘cinéma indépendant' varie considérablement selon le contexte où on l'étudie. Alors qu'aux Etats-Unis, la classification s'applique principalement aux films tournés en dehors des studios dominants de Hollywood, cette appellation prend en Europe des connotations bien différentes. Dans certains cas, ‘indépendants' se réfère aux films financés par les aides publiques d'organismes d'états. Un tel système de subventions garantit aux réalisateurs la liberté d'aborder leur vision propre du cinéma en dehors de toutes considérations commerciales et sans se soucier des préférences du grand-public. Ce principe de subvention est alors assimilé au garant d'une tradition nationale cinématographique qui sans concours financier ne pourrait rivaliser avec les blockbusters produits à Hollywood ou ailleurs. Dans d'autres cas dans des pays tels l'Allemagne, le terme ‘indépendant' se réfère quelquefois aux productions à petit-budget conçues sans aucun financement public. En Autriche, le terme est aussi utilisé pour parler des productions tournées sans le concours de réseaux de diffusion TV qui dominent le marché des films dits ‘domestiques'. En Chine (ou toute autre nation sous contrôle autoritaire), le même terme signifiera plutôt ‘indépendant de toute forme de contrôle d'état'.

Cet article examinera la signification du ‘cinéma indépendant' dans le cadre du cinéma japonais. L'accent sera mis sur la manière dont le terme a évolué à travers le siècle passé tout en rappelant la nécessité de bien garder à l'esprit le contexte historique lorsque l'on aborde ce sujet. Cet article se focalisera sur les décennies soixante et soixante-dix et plus principalement sur l'Art Theatre Guild.

Crédits d'ouverture Toho, Shochiku et Toei

Au niveau du cinéma japonais, que signifie exactement le terme ‘indépendant' ? Le contrôle et l'influence des autorités ne semblent pas être un problème majeur au Japon. De plus il n'y a pas d'équivalent aux systèmes de subventions tel qu'on le connaît dans la plupart des pays européens. Si les films des studios semblent dominer le marché local, une étude plus attentive révèle que cette domination n'est effective qu'au stade de la distribution et non au stade de la production. De nos jours, les trois grands studios Toho, Shochiku et Toei ne sortent qu'une poignée de productions internes. Plus de 90% de tous les films sont produits hors du cadre des studios. Même au niveau de la distribution où les studios ont pourtant un rôle majeur, plus de 75% des films sont distribués par des distributeurs indépendants. Ces films connaissent habituellement une exposition bien plus limitée que ceux distribués par les studios. La plupart de ces productions à petit budget ne cherchent ni les bénéfices ni à rentrer dans leurs frais. Bien que le statut ‘indépendant' sous tend une opposition aux grands studios, le fait que les grands studios aient virtuellement abandonné leur production et que la majorité des films soient distribués par des structures autres rend la définition du qualificatif ‘indépendant' très ambigu. L'hétérogénéité de leurs formes, styles et contenus rend d'autant plus délicat le rapprochement du statut d'indépendant avec celui d'auteur, les films mainstream pouvant également être inclus dans cette catégorie. Aujourd'hui, il semble que la dénomination ‘film indépendant' ait totalement perdu de sa véritable signification.