.Sion Sono, posture ambiguë
 
 
Indépendant

Sion Sono naît en 1961 à Toyokawa City dans la Préfecture japonaise d'Aichi. Amoureux de littérature – et plus particulièrement de poésie – il tente de publier ses créations personnelles dès son adolescence; avec succès, réussissant à éditer ses premiers poèmes à l'âge de dix-sept ans dans des revues aussi imminentes que The Modern Poem Book ou Eureka . Evoluant dans son art, Sion se heurte pourtant rapidement à des limites, regrettant que les mots seuls ne suffisent pas toujours à traduire l'émotion de ses inspirations. Auteur de textes souvent enragés, il craint que ses lecteurs s'approprient les écrits et les déforment selon leur propre prisme émotif. Etudiant à l'Université de Housei, il abandonne donc ses études pour se consacrer à la réalisation de films 8mm expérimentaux. Cherchant à se rapprocher au plus près de son public, il trouve une première solution, en se filmant en train de réciter ses poèmes avec l'intensité adéquate. Le résultat donnera I am Sion Sono!! ( Ore wa Sion Sono da!! ), un premier moyen-métrage d'une trentaine de minutes, réalisée en 1985 et sélectionné au PIA, le festival du Film Indépendant de Tokyo. Le résultat prend la forme d'une chronique intime étalée sur trois semaine où l'artiste se livre un bilan personnel à l'approche de son anniversaire. Ce même Festival sélectionnera également son second moyen-métrage en 1987, Otoko no Hanamichi . Il gagnera le Grand Prix, lui permettant d'obtenir une aide financière à l'aide de laquelle il finance en partie Bicycle Sighs ( Jitensha Toiki ), son premier long-métrage, tourné en 16mm en 1990 Entre-temps, il signera Love (Ai) ainsi qu'une une petite fantaisie délurée, Decisive Match! Girl's dorm against Boy's dorm ( Kessen! Joshiryo tai Danshiryo.


Bicycle Sighs
Bicycle Sighs ( Jitensha Toiki ) raconte l'histoire de deux glandeurs copains d'enfance, Shiro et Keita. Alors que leurs camarades sont partis poursuivre leurs études à l'université, eux tentent de se tenir à flots en distribuant des journaux. Shiro n'a qu'un seul but dans la vie: glandouiller en tentant de terminer un long-métrage en 8mm commencé au lycée. Keita, lui, commence à se sentir mal d'être ainsi passé à côté de sa vie. Il va très mal encaisser l'annonce de la prochaine visite de son premier amour parti étudier à Tokyo. L'histoire est en partie biographique (le personnage de Shiro est interprété par Sion lui-même) et largement influencé par le proche entourage de Sono Sion et de Hisashi Saito, scénariste des futurs Tokyo Fist de Shinya Tsukamoto et Chaos de Hideo Nakata. Voyage initiatique d'un jeune loser dans un Japon perfectionniste, le film décroche un joli succès commercial et fera le tour d'une trentaine de Festivals Internationaux au cours des deux années suivantes.


The Room
Son long-métrage suivant, The Room ( Heya ), tourné en 1992, fera encore mieux. Sélectionné à une cinquantaine de Festivals à travers le monde, il réussit une nouvelle fois à rallier succès critique et populaire. L'histoire – cette fois écrite par Sono Sion seul – raconte l'étrange pèlerinage surréaliste et métaphorique d'une agente immobilière faisant visiter nombre d'appartements en location à un tueur mutique en quête d'un havre de paix. Ne trouvant satisfaction, la femme entraîne son client dans les quartiers décadents à l'extérieur de la capitale. Malgré une production à petit budget, le réalisateur va réunir une belle palette d'acteurs, dont Akaji Maro (ses futurs Suicide Club et Comme des dans un rêve , mais également Zigeunerweisen de Seijun Suzuki, Dangan Runner de Sabu ou City of Lost Souls de Miike), Yoriko Douguchi ( Taxing Woman 2 de Juzo Itami, Swallowtail & Butterfly de Shunji Iwai ou Cure de Kyoshi Kurosawa). Sion gagnera le Prix Spécial du Jury au Festival du Film du Sundance…tokyoïte. La même année, il apparaît comme acteur dans le film d'Eiichi Uchida, I hate you…not ( Kirai…janaiyo ), témoignant de son amour du jeu et confirmant son attrait pour le métier d'acteur. Outre Bicycle Sighs ( Jitensha Toiki ) et futur Utsushimi (1998), on le verra également dans un cameo aux côtés du réalisateur Shinya Tsukamoto dans le dernier film de Teruo Ishii daté de 2001, Blind Beast versus Dwarf.