.Tsukamoto Shinya : acteur
 
 
Le goût des autres


Tsukamoto dans "Most terrible time in my life" (1993).
Outre d'apparaître dans quasiment tous ses films – à l'exception de ses deux projets de commande – Shinya TSUKAMOTO a également fait l'acteur dans de nombreuses productions nippones de ces dernières années. Faisant du théâtre depuis l'âge de dix ans, il aime à se donner en spectacle et dit ne connaître aucune appréhension à endosser n'importe quel personnage; il est seulement chagriné d'avoir manqué de temps pour suffisamment se préparer aux rôles dans ses propres films et avoue ne pas toujours avoir été à la hauteur.
Bon interprète, il n'a jamais encore transcendé l'écran. Capable de jouer de doux pères de famille, comme de furieux psychopathes, ses interprétations ne se différencient guère les unes des autres. Autant ses réalisations resteront comme de dates majeures au sein de l'Histoire du Cinéma nippon, autant ses rôles sont loin – pour l'instant – de marquer les esprits. Il n'empêche, qu'il ne déshérite aucunement devant de nombreux soi-disant "professionnels" du métier, dont les cabotinages et pitreries embarrassantes n'arrivent pas à la cheville des apparitions de l'acteur et réalisateur TSUKAMOTO. Au moins, il assume totalement son statut et assouvit sa propre passion jusqu'au bout – loin du cas de bien d'autres personnes !


Tsukamoto en bodybuilder
dans "Ichi the killer" (2001).
Outre ses propres premiers films, TSUKAMOTO fait sa première apparition dans un rôle secondaire dans l'excellent "Waga jinsei saiaku no toki" ("The Most terrible time in my life") en 1994.
Première partie parodique d'une future trilogie mélangeant habilement le film de gangster avec la Nouvelle Vague française, le film embrasse tous les clichés du polar noir, à commencer par le nom du personnage principal, le détective privé Miku Hama (évidemment dérivé japoniste de l'américain Mike Hammer). TSUKAMOTO accepte de faire une brève apparition dans un film signé HAYASHI Kaizo ("Zipang", "Cat's Eye"…mais aussi la série télévisée "Power Rangers Time Force"), qui l'avait solidement secondé à ses débuts sur "Hiruko the Goblin". TSUKAMOTO reprendra son même personnage dans la suite des aventures du détective privé l'année suivante dans "Harukana jidai no kaidan o" ("Stairway to the distant past").
De la même manière, le stakhanoviste acteur du Cinéma Japonais actuel TAKENAKA Naoto (personnage récurrent de la série "Perfect Education" et habitué des productions Miike) inclut TSUKAMOTO au générique de sa seconde réalisation "119" ("Quiet Days of Fireman") moyennant ses participations à "Hiruko" et le futur "Tokyo Fist". Cette sympathique comédie décrit les dérives amoureuses des pompiers d'un petit village qui n'avaient jusque-là encore jamais été confrontés à aucune affaire brûlante.
La riche collaboration des deux hommes ne s'arrêtera pas à si bon chemin, leurs routes s'entrecroisant à nouveau à toutes les nouvelles réalisations de TAKENAKA. "Tokyo biyori" est la sensible adaptation d'une partie du journal intime du photographe mondialement connu ARAKI Nobuyoshi, réalisé en 1997; "Rendan" ("Quartet for two"), en 2001, marque le retour de l'acteur à la mise en scène d'une comédie (noire).
En 1999, tous deux seront les interprètes du premier épisode du pinku eiga "Perfect Education" de Ben WADA.
En 1996, TSUKAMOTO tient des petits rôles dans le méconnus "Some kinda love" de NAGASAKI Shunichi (pour lequel il va également interpréter un rôle dans son "Dogs" l'année suivante) et "Atolanta bugi" ("Atlantic Boogie") de YAMAMOTO Masashi.
Juste après avoir terminé le tournage de son propre "Bullet Ballet", TSUKAMOTO fait une brève apparition dans le film de SOMAI Shinji ("Typhoon Club"), "Ah haru" ("Wait and See").
Malgré leur différent artistique sur l'écriture du scénario de "Tokyo Fist", SAITO Hisashi et TSUKAMOTO se retrouvent le temps de la réalisation du long-métrage "Sunday Drive", tourné en 1998.


Tournage de "Marebito"
Tsukamoto et Shimizu (2004).
Les mauvaises langues affirmeront, que "Sakuya : yokaiden" ("Sakuya : Slayer of Demons" de HARAGUCHI Tomoo ne valait finalement pas mieux qu'un mauvais épisode du "Muppet Show" avec sa ribambelle de monstres en peluche. TSUKAMOTO y sera noyé dans le rôle du sorcier. Plus important sera son apparition dans le rôle du magicien enjoué dans le fameux "Dead or Alive 2" de Takashi MIIKE. Personnage lynchien par excellence, son apparition furtive marquera les mémoires par ses tours de magie expressément acquis pour les besoins du film. TSUKAMOTO retrouvera d'ailleurs Miike pour un important rôle dans son culte "Ichi the Killer" en hypnotiseur du serial killer manipulé.
Autre collaboration de prestige avec Teruo ISHII (dont ce sera également le dernier film), "Moju tai Issunboshi" ("Blind Beast vs. Dwarf"), un film testament indigne du talent du metteur en scène vétéran, tourné avec une somme dérisoire en DVoù TSUKAMOTO incarne le rôle de Kogorô Akechi, détective récurent de l’œuvre de Edowaga Rampo
Un autre réalisateur engagé comme acteur dans un film de TSUKAMOTO ("Vital") sera RIJU GO, qui débauchera son collègue le temps d'apparaître dans "Kuroe" ("Chloé") en 2003.
Adepte des titres de films en français, le réalisateur OTANI Kentaro ("Avec mon mari", "Nana") confie le rôle principal à TSUKAMOTO dans son excellente comédie romantique "Travail" en 2002.
La même année sort finalement l'obscur "Oboreru hito", tourné en 2000 par ICHIO Naoki, ainsi que la série de télévision basée sur le délirant détective Miku Hama, au cours de laquelle TSUKAMOTO retourne le temps d'un épisode ("Man Woman, Woman Man" (aka "Mike Hama must die"). D'autres séries suivront d'ailleurs en 2003, dont "Engimono" et "Semishigure".
2004 célèbre son retour dans de productions importantes, dont "Marebito" ("The Stranger from Afar") de SHIMIZU Takashi ("Ju-On"). Le premier rôle de TSUKAMOTO n'est certainement pas innocent, l'histoire contant la fascination d'un réalisateur indépendant pour la violence à l'écran...
Participant au délirant projet mêlant l'animation et le live dans "Tracing Jake" de YAMAMURA Koji ("Mountain Head"), le film le plus important de l'année sera incontestablement "Koi no mon" ("Otakus in love") premier long métrage de l'acteur MATSUO Suzuki, qui signe une adaptation réussie du célèbre manga originel du même nom.
Sa carrière d'acteur actuellement mise en veille pour cause de ses propres projets, TSUKAMOTO ne saurait certainement tarder à célébrer son retour au grand écran; en espérant, qu'il trouve enfin un rôle à travers duquel il saurait donner toute l'étendue de son talent.

Bastian Meiresonne - novembre 2005