.Tsukamoto Shinya
 
 
Premiers émois

Le père de TSUKAMOTO, aimant les dernières choses à la mode, ramène un jour une caméra 8 mm à la maison. Shinya est fasciné et laisse bientôt tomber ses activités sportives pour se consacrer corps et âme au tournage de films. Réquisitionnant voisins et amis, il tourne ribambelle de productions dès son plus jeune âge.
Parmi ses premières productions figurent "Bruce Koji", un court-métrage cherchant à faire passer son jeune frère pour le sosie de Bruce Lee et "Intentions of Ninja" se focalisant toujours sur la dextérité sportive de Koji en lui faisant endosser le personnage d'un ninja.
Après ces débuts balbutiants, simples pantalonnades entre gamins enregistrés sur le vif, Shinya a pour projet de réaliser son premier long-métrage à l'âge de quatorze ans. Dévorant un guide écrit par TSUBURUYA Eiji pour fabriquer des masques en latex de montres, TSUKAMOTO veut adapter sa propre version d’un kaiju eiga. N'arrivant – en pratique – à dépasser les premiers chapitres, il se rabat sur l'adaptation du manga "Genshi-San" ("Monsieur Primitif") de MIZUKI Shigeru. Court-métrage de dix minutes, il s'agit d'une variation du kaiju eiga d'un homme préhistorique revenant à la vie et détruisant tout sur son passage. Avide d'avoir un retour de ses prouesses, il organise des projections à la maison et à son école.
L'année suivante, TSUKAMOTO embraye la vitesse supérieure en réalisant un film d'une cinquantaine de minutes, "Kyodai Gokiburi Monogatari" ("Histoire de Cafards Géants"). Quatre personnages sont enfermés dans un dortoir, alors que des cafards géants sont supposés hanter les couloirs de l'immeuble. Ne sachant comment fabriquer les créatures monstrueuses, le film s'apparente davantage à un huis-clos, qu'au film de monstres tant rêvé. Il enchaîne par "Tsubasa" ("Aile"), l'histoire de deux amis cherchant à s'envoler en construisant un engin à partir d'une bicyclette et d'une paire d'ailes.
Il va davantage au cinéma et regarde beaucoup de films étrangers, avant de s'intéresser au cinéma japonais et de citer comme références Akira KUROSAWA, OKAMOTO Kihachi, KUMASHIRO Tatsumi, ICHIKAWA Kon et IMAMURA Shohei. "Seishun no Satetsu" ("Bitterness of Youth" / "L'amertume de la jeunesse") de KUMASHIRO Tatsumi (comportant une longue scène de course-poursuite caméra à l'épaule à travers les rues de Tokyo) aura une profonde répercussion sur son œuvre à venir.
"Donten" ("Ciel maussade") est une nouvelle adaptation – en Noir & Blanc – d'un manga de YAMAGAMI Tatsuhiko concernant deux pacifistes, emprisonnés et torturés dans une société futuriste plongée en pleine guerre. TSUKAMOTO n'hésite plus à montrer ses films, louant expressément de salles de théâtre ou de cinéma pour projeter ses œuvres devant un public – en large partie – constitué de voisins et amis.
Son "Jigokumachi Shoben Geshuku nite Tonda yo" ("Voler dans un putain de taudis pisseux") est clairement marqué par l'œuvre de KUROSAWA (notamment "Vivre", "Dodeskaden" et "Les Bas-Fonds"). Ambitieux projet, le film dure plus de deux heures (re-montage d'une première version de 150 min !!!). Adaptation de la vie réelle d'un artiste, qui – au seuil de sa mort – cherche à peindre son ultime chef-d'œuvre, il s'inspire des biographies des artistes japonais SEKINE Shoji, MATSUMOTO Shunsuke et MUNAKATA Shiko. Cette nouvelle réalisation lui vaut de passer à la télévision. L'émission "Ginza Now" promeut de nouveaux et jeunes talents issus de Tokyo et outre son interview, y sont présentés plusieurs extraits de ses films. Si TSUKAMOTO rejette en général la plupart de ses œuvres datant de sa jeunesse, il est particulièrement fier de ce film et aimerait un jour adapter son propre remake.
Après avoir passé son bac, son premier film lors de ses études universitaires est "Shin Tsubasa" ("Ailes 2") (1978). Désormais fortement inspiré par les travaux de TERAYAMA Shuji, il accorde beaucoup d'importance à la lumière; mais se sentant de plus en plus proche du monde théâtral, il prend également moins de plaisir à tourner ses films.
"Hasu no Hana Tobe" ("Vole, fleur de lotus !") en 1979 allait donc être sa dernière réalisation avant bien des années. Racontant la relation particulière entre une troupe de théâtre et un yakusa, TSUKAMOTO tente de réaliser son chef-d'œuvre ultime, engageant pour la première fois des adultes pour tenir le rôle des personnages plus âgés; mais il est fortement déçu par le résultat, pas à la hauteur de ses espérances. Son amour grandissant pour le théâtre et l'échec relatif de cette production le poussent donc à temporairement abandonner ses réalisations.